Je marchais tête baissée, manquant de souffle, depuis 53 ans, je courrais partout, c’est une image, je passais mon temps à survivre de ces créatures qui voulaient me tuer. Je me cachais de buissons en buissons, derrière les troncs d’arbre. Ce n’était pas une vie, je devenais dingo. A chaque spas, je me retournais, je m’attendais à ce que quelqu’un me fonce dessus et m’ôte mon sang. Je ne pouvais pas mourir, 53 ans que j’étais là, 53 ans que je survivais caché, je n’avais pas encore eu à faire à des monstres et je n’étais pas vraiment pressée. Je soufflais, mon visage était marron de boue, les rayures blanches de mon haut était devenues marron et mon jean commençait à tomber en lambeaux. Je soupirais et quelques larmes sortirent de mes yeux, je n’en pouvais plus, j’étais à bout de forces, je m’arrêtais deux secondes pour reprendre mon souffle, peuh, tu parles, à chaque bruit que j’entendais, je détalais de peur de croiser un monstre. Je courais à perdre haleine je ne savais pas où, je devais connaître ce lieu mais mes yeux embrumées de larmes, je ne voyais rien.

Après quelques centaines de mètres à courir du plus vite que je pouvais, j’allais à droite pour arriver devant un grand arbre, oui, un arbre gigantesque. Je me souvenais de cet arbre, en 53ans, j‘avais eu le temps de le visiter, depuis très longtemps, un sourire étira mon visage, c’était au point que j’avais mal. Rassemblant le peu de force qui me restait, je grimpais dans l’arbre. J’avançais lentement, progressivement mais sûrement, arrivée en haut, je pourrais reprendre des forces et me reposer. Je montais en utilisant mes bars et mes jambes et j’arrivais sur une petite plate forme, je repris mon souffle, ne me considérant pas assez en sécurité et trop voyante, je m’enfonçais dans les feuillages.

J’avais dû faire peur à quelqu’un car j’entendis une voix, un monstre, mon cœur de mit à battre, dans un geste, je me penchais pour regarder qui étais là, une jeune femme venait de se dresser en tournant la tête, ce ne semblait pas être un monstre, sinon, il aurait déjà dû sentir mon odeur, il faut dire que j’empestais le marcassin crevé. Je fus soulagée, d’un geste brusque, je traversais les feuillages pour me retrouver en face de la jeune femme. Une femme, ca faisait si longtemps que je n’en avais pas vue.

« Diantre, une femme ! J’approchais ma main de son visage d’un mouvement lent et progressif pour la toucher, lui toucher le visage, sentir quelqu’un, c’était si bon, je m’approchais de quelques pas. Ça fait si longtemps ! »

Je m'étais redressée, et était désormais debout, en équilibre instable, sur la branche. La personne qui s'approchait surgit enfin d'entre les feuilles, mais venant du bas. Elle n'était pas une créature, cela se pressentait. Je me reassis alors, et elle approcha la main de mon visage. Je fixai sa main, surprise, mais laissait faire. Peut être était elle une nouvelle arrivée, qui n'avais vu personne depuis un certain temps, et qui se demandait dans quel monde de malade elle se retrouvait ? Je décidais de jouer sur la corde de l'humour, un grand sourire au lèvre.

Oui, je suis une femme. Pourquoi, je commence à ressembler à un homme, avec le temps ?

Heureusement-ou pas, on gardait le même aspect qu'au moment où l'on était rentré dans le bois. J'aurais pu avoir une tenue plus appropriée, certes, mais au moins, mes cheveux avaient été coupé deux semaine avant mon entrée dans le bois, et je m'étais épilée quelque jours avant aussi. J'imaginais ceux dont ce n'étais pas le cas. Les pauvres. Je me présentais à la jeune femme.

April Everwood. Et toi... vous ?

Je ne savais jamais comment m'adresser aux personnes ici. Etais je supposée de la tutoyer, ou était elle bien plus vieille, et donc devais je la vouvoyer ? Je ne savais absolument pas. Je la laisserais choisir au moment venu.

-Cela fait combien de temps que tu es coincée ici ?

Elle affirmait que c’était une femme, tant mieux, je savais encore reconnaître une femme à un homme, d’un côté, ça me soulageait, ca faisait si longtemps que je n’avais pas vu une seule personne. Elle décida de jouer la carte de l’humour mais je n‘avais aucune envie de sourire, mes yeux regardait le vide, on aurait dit une droguée je vous dis, je faisais peur. Je ne répondis pas, me contentant de la regarder, ça me suffisait pour l’instant, voir quelqu’un, ça faisait du bien, ça soulageait aussi, je n’étais pas toute seule dans ce maudit trou à créatures, elle risquait sa vie tout autant que moi. April Erverwood qu’elle s’appelait, puis elle enchaina avec une question, combien de temps ? Longtemps, très longtemps.

« Patricia Summers, je marquais une pause. 53 ans exactement que je suis ici. Nouveau silence, je fis un pas de plus et me tournais, je me retrouvais dos à la jeune femme. Tutoie-moi si tu veux, aucune importance. »

Cela faisait si longtemps que je ne savais même plus me servir d’une brosse à cheveux, j’avais même oublié comment se passait une conversation humaine normale, je mis du temps à percuter que la moindre des politesses aurait été de lui retourner la question, je faisais çà étant plus jeune, « et toi ? » tous le temps, je me retournais vers la jeune femme, elle était blonde et belle ; je la trouvais belle, en même temps, c’était la seule femme que j’avais vue depuis des années.

« Et toi ? Depuis combien de temps ? Je marquais une petite pause pour m’approcher d’elle en faisant attention de ne pas tomber ? Longtemps ? »